Elsevier

Revue Neurologique

Volume 165, Issue 11, November 2009, Pages 845-856
Revue Neurologique

Progrès neurologique
Évaluation des troubles comportementaux hyper- et hypodopaminergiques dans la maladie de ParkinsonAssessment of hyper- and hypodopaminergic behaviors in Parkinson's disease

https://doi.org/10.1016/j.neurol.2009.06.003Get rights and content

Résumé

Le stéréotype du patient parkinsonien dépressif, anxieux et apathique est actuellement bouleversé par la description récente de troubles comportementaux sévères et destructeurs comme le jeu pathologique ou l’hypersexualité, liés à une addiction dopaminergique. Cependant, des modifications comportementales peuvent survenir sans addiction dopaminergique. Elles sont nombreuses et variées, bénéfiques ou néfastes, bénignes ou sévères, et largement sous-évaluées car elles ne sont pas rapportées spontanément par les patients. Nous proposons une échelle d’évaluation comportementale, spécifiquement adaptée à la maladie de Parkinson. Elle est basée sur les concepts « d’hypodopaminergie » qui reflèterait l’hypofonctionnement dopaminergique et « d’hyperdopaminergie » lié à une sur-stimulation dopaminergique. Ainsi, des troubles psychiques et comportementaux aigus liés aux fluctuations hyper- ou hypodopaminergiques accompagnent fréquemment les fluctuations motrices. Cette échelle est construite en 18 items, regroupés en quatre parties : évaluation psychique générale, apathie, fluctuations non motrices et comportements hyperdopaminergiques. Une cotation en cinq points (0–4, d’absent à sévère) pour chaque item se fait au cours d’un entretien semi-structuré. Des questions ouvertes permettent au patient de s’exprimer le plus librement possible et des questions fermées précisent l’évaluation en termes de sévérité. Cet outil, utile dans la gestion du suivi thérapeutique des patients, peut s’intégrer à l’examen neuropsychologique au même titre que l’évaluation cognitive.

Abstract

The common perception that Parkinson's disease patients tend to be depressed, anxious, apathetic and harm-avoiding has currently been challenged by the recognition that they can also exhibit a hedonistic, novelty-seeking personality. Thus, Parkinson's disease patients may indulge in their passions in an irresponsible and disinhibited manner, and engage in repetitive, compulsive behaviors that may be harmful and destructive to their social or professional lives. The dopamine dysregulation syndrome includes hypersexuality, pathological gambling, and compulsive shopping; it is associated with addiction to dopaminergic medication. However, not all behavioral changes are necessarily accompanied by a dopaminergic addiction. After antiparkinson treatment is initiated, patients enter a ‘honeymoon period’ during which changes in mood and behavior reflect a return to the patients’ premorbid personality. The increased motivation and higher level of activity in professional as well as leisure activities are considered positive changes by both the patients and their relatives. With prolonged and increased dopaminergic treatment, these positive behavioral changes can become excessive and evolve into nocturnal hyperactivity and stereotyped, repetitive and time consuming behaviors which ultimately disorganize the patient's everyday routine and herald behavioral addictions. These drug-induced behavioral changes are under-appreciated by neurologists and under-reported by the patients who neither complain about the behaviors nor understand the relationship between motivated behavior and dopaminergic medication. For these reasons, we propose a new scale for the assessment of behavior and mood to quantify and track changes related to Parkinson's disease, to dopaminergic medication, and to non-motor fluctuations. This scale is based on the concept of hypo- and hyperdopaminergic mood and behavior. The scale consists of 18 items addressing non-motor symptoms, grouped in four parts: general psychological evaluation, apathy, non-motor fluctuations and hyperdopaminergic behaviors. The rating in five points (0–4 from absent to severe) is carried out during a semi-structured interview. Open-ended questions introduce each item, allowing patients to express themselves as freely as possible. Close-ended questions permit the rating of severity and intensity. This new instrument can be used by psychologists, psychiatrists or neurologists familiar with Parkinson's disease. Designed to detect changes in mood and behavior of Parkinson's disease patients resulting either from the disease or its treatment, this tool can be used in conjunction with the neurocognitive evaluation, to help tailor the treatment of motor and non-motor symptoms to each individual's needs.

Section snippets

La cognition

L’objectif traditionnel de l’examen neuropsychologique est l’évaluation des troubles cognitifs. Bien que l’intellect dans la maladie de Parkinson ait longtemps été considéré intact, dès 1922, Naville (1922) présentait l’examen (neuro)psychologique d’un patient atteint d’encéphalite léthargique. Il concluait qu’il y avait « un ralentissement des opérations intellectuelles exigeant de la réflexion, un effort de concentration et de création […] d’adaptation à des difficultés nouvelles » (première

Le concept d’hypo- et d’hyperdopaminergie

La maladie de Parkinson est maintenant considérée comme une maladie neuropsychiatrique (Agid et al., 2003) et la qualité de vie des patients dépend non seulement de l’état moteur et de l’état cognitif, mais aussi de l’état psychique (Schrag et al., 2000). L’éventail des troubles comportementaux dans la maladie de Parkinson est très large. Il peut aller d’un état dépressif, anxieux et apathique à un état de type hypomaniaque associé ou non à des addictions comportementales (Evans et Lees, 2004 ;

Outil – échelle d’évaluation comportementale de la maladie de Parkinson (ECMP)

Nous avons donc souligné l’importance des troubles psychiques et comportementaux dans la maladie de Parkinson : les troubles hyperdopaminergiques, associés aux traitements ; les troubles hypodopaminergiques comme l’apathie, l’humeur dépressive ou l’anxiété, liés au moins en partie à l’hypofonctionnement dopaminergique et les troubles aigus dans le cadre des fluctuations on-off. S’ajoutent également des troubles variés plus difficilement associés à un dysfonctionnement cérébral spécifique, comme

Apport de l’évaluation comportementale dans la prise en charge thérapeutique

Pour illustrer à quel point le comportement peut être modifié dans la maladie de Parkinson, quel peut être l’apport de l’évaluation comportementale dans la prise en charge des patients et comment des ajustements ou des décisions thérapeutiques peuvent améliorer les troubles, nous présentons le cas de deux patients. Le premier est un patient de novo avec un fonctionnement psychique hypodopaminergique inaugural ; le second illustre le caractère dramatique des comportements hyperdopaminergiques.

Conclusion

La détection du fonctionnement global sur un continuum hypo- ou hyperdopaminergique devient nécessaire pour pleinement profiter des atouts et éviter les pièges des traitements. Ces troubles, avec une sémiologie proche des maladies psychiatriques, mais cependant très spécifiques de la maladie de Parkinson, doivent être pris en charge par les neurologues ou par des psychiatres avertis car ils sont complètement dépendants des traitements antiparkinsoniens et parallèles aux troubles moteurs. Ils

Conflits d’intérêts

Pas de conflits d’intérêts à déclarer en lien avec l’article.

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    Groupe évaluation comportementale de la maladie de Parkinson : P. Auquier, laboratoire de santé publique, faculté de médecine, université de la Méditerranée, Marseille, France ; C. Arbus, laboratoire stress traumatique, université Paul-Sabatier, service de psychiatrie adulte, CHU Purpan, Toulouse, France ; C. Ardouin, université de Grenoble, Inserm U836, neurologie, CHU de Grenoble, Grenoble, France ; KR. Chaudhuri, Neurology, King's College Hospital, London, UK ; I. Chéreau, service de psychiatrie B, CHU de Clermont-Ferrand, Clermont-Ferrand, France ; V. Czernecki, Inserm-UPMC UMRS 610, fédération de neurologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, université Paris-6, Paris, France ; K. Dujardin, département de neurologie, CHU de Lille, France ; F. Durif, service de neurologie A, CHU de Clermont-Ferrand, Clermont-Ferrand, France ; V. Fraix, université de Grenoble, Inserm U836, neurologie, CHU de Grenoble, Grenoble, France ; A. Funkiewiez, Inserm-UPMC UMRS 610, fédération de neurologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, université Paris-6, Paris, France ; J.-L. Houeto, service de neurologie et CMRR, CHU de Poitiers, Poitiers, France ; M. Jahanshahi, Institute of Neurology, Queen Square, London, UK ; A. Juphard, neurologie, CHU de Grenoble, Grenoble, France ; H. Klinger, service de neurologie C, hôpital neurologique, CHU de Lyon, France ; P. Krack, université de Grenoble, Inserm U836, neurologie, CHU de Grenoble, Grenoble, France ; P. Krystkowiak, service de neurologie, CHU d’Amiens, France ; E. Lhommée, université de Grenoble, Inserm U836, neurologie, CHU de Grenoble, Grenoble, France ; P.-M. Llorca, service de psychiatrie B, CHU de Clermont-Ferrand, Clermont-Ferrand, France ; P. Martinez-Martin, National Center for Epidemiology and CIBERNED, ISCIII, Madrid, Spain ; A. Pelissolo, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, AP–HP et UPMC, Paris, France ; B. Pillon, fédération de neurologie, hôpital de la Salpêtrière, université Paris-6, Paris, France ; P. Pollak, université de Grenoble, Inserm U836, neurologie, CHU de Grenoble, Grenoble, France ; M. Schupbach, département de neurologie, Inselspital, hôpital universitaire de Berne, Suisse ; F. Tison, département de neurologie, CHU de Bordeaux, Bordeaux, France ; L. Verhagen, Neurology Department, Rush University, Chicago, USA ; K. Witt, Klinik für Neurologie, Christian Albrechts Universität Kiel, Allemagne.

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